Il y a une scène que je vois trop souvent. Une entreprise dépense des fortunes dans une campagne de recrutement magnifique. Des visuels léchés, des slogans inspirants, des promesses d'épanouissement... sur le papier, c'est parfait. Mais en interne, les collaborateurs lèvent les yeux au ciel. Parfois, ils en rient. Parfois, ils sont juste cyniques.
Ce décalage, ce grand écart entre la vitrine et l'arrière-boutique, c'est le cancer silencieux de la marque employeur.
Lors de ma récente conversation avec Anne-Sophie Noël que j’ai eu le plaisir d’interviewer dans l’épisode 32 du podcast HR Stay Tuned, elle a mis le doigt sur ce qui fait mal avec une franchise qui m'a marquée : « S'il y a un décalage entre ce qu'une entreprise va dire d'elle-même en communication externe, ses ambassadeurs, c'est-à-dire ses collaborateurs, vont très rapidement dire : "Non, non, non, ça c'est du bullshit, ce n'est pas exactement comme ça." »
"Bullshit". Le mot est lâché. Et il est juste.
A une époque où la confiance est une monnaie si rare, il est temps d'arrêter ce théâtre d'entreprise. Arrêtons de vendre du rêve. Commençons à partager la réalité.
Le problème n'est pas nouveau. En fait, c'est le sujet sur lequel j'ai fait mon mémoire de fin d'études : l'alignement entre la communication interne et externe. Déjà à l'époque, l'évidence me sautait aux yeux. Et aujourd'hui, le phénomène est amplifié par une transparence radicale imposée par le digital.
Vos candidats ne sont pas naïfs. Avant même de postuler, ils ont déjà mené leur enquête sur les réseaux sociaux, ou en contactant d'anciens employés. Ils savent. Et les chiffres le confirment. Selon une étude de LinkedIn Talent Solutions, les candidats font trois fois plus confiance aux employés d'une entreprise qu'à l'entreprise elle-même pour obtenir une information crédible sur l'environnement de travail.
Trois fois.
Relisez cette statistique. Elle signe l'acte de décès de la communication corporate top-down et aseptisée. Le site carrière avec des acteurs souriants autour d'une machine à café ? Personne n'y croit. Le discours policé du CEO sur les "valeurs" ? Il est immédiatement confronté aux récits, bons ou mauvais, que partagent les équipes sur le terrain.
Comme le dit si bien Anne-Sophie, vos véritables ambassadeurs ne sont pas vos agences de com. « Les collaborateurs d'une entreprise sont ses premiers ambassadeurs. » Ils sont votre seule source de vérité. Les ignorer, ou pire, les contredire, n'est pas seulement une erreur. C'est un suicide de marque.
Alors, on fait quoi ? On baisse les bras ?
Au contraire. On change radicalement de paradigme. La solution est d'une simplicité désarmante, mais elle demande du courage : il faut faire de l'authenticité une stratégie.
Anne-Sophie l'a parfaitement résumé : « Une bonne campagne d'employer branding, pour moi, c'est une campagne qui est faite avec les collaborateurs. »
Cela va bien au-delà de quelques témoignages vidéo scriptés. Il s'agit de co-créer votre récit. Cela s'appelle l'"Employee Advocacy", mais débarrassons-nous du jargon. En clair, il s'agit de créer un environnement où vos équipes sont non seulement écoutées, mais où elles se sentent fières et en sécurité pour partager leur expérience réelle.
Comment on fait, concrètement ?
Cette conviction, je la porte depuis des années. C'est ce qui m'a poussée récemment à lancer Jobloom, ma nouvelle aventure. J'ai vu trop d'entreprises vouloir être authentiques, mais se heurter au manque de temps ou de budget pour créer du contenu de qualité.
Mon obsession, c'est de rendre cette authenticité "sexy" et accessible. Comme je l'expliquais à Anne-Sophie, on intègre directement la création de ce contenu vivant et incarné dans la conception des sites carrière. On aide les entreprises à interviewer leurs talents, à transformer ces pépites en histoires captivantes, pour que leur marque employeur soit enfin le reflet fidèle et attractif de leur culture.
Car au final, la meilleure marque employeur n'est pas celle qui promet la lune. C'est celle qui vous dit : "Voilà qui nous sommes, avec nos forces, nos défis, et les gens incroyables qui font tourner la boutique. Si ça vous parle, rejoignez-nous."
C'est une invitation, pas une publicité. Et c'est là toute la différence.